Le b.a.-ba de la diversité auditive : qui sont les sourds ?

SARA GUÉRIN-PANICHI est la fondatrice de Sign&Connect, cabinet spécialisé en sensibilisation au monde sourd et en communication visuelle. Sara est aussi la directrice Marketing et Commerciale de Média’Pi, le média en LSF de la communauté sourde, ce qui lui permet de travailler au quotidien avec une équipe sourde et de « vivre » dans le monde sourd. Elle partage pour ATHEME Hebdo conseils et bonnes pratiques pour acceuillir un sourd en formation.

Il est bien difficile de faire une généralité pour toutes les personnes sourdes, qui sont toutes « uniques », en fonction de leur vécu : leur degré de surdité, à quel moment de la vie la surdité est intervenue,  à quel âge la surdité a été détectée, s’ils sont équipés d’un implant ou d’un appareil auditif, s’ils utilisent ou pas la langue des signes ou la Langue Française Parlée Complétée (LfPC ou code LPC), s’ils ont eu une éducation oraliste ou en langue des signes (Langue des Signes Française, communément appelée LSF), s’ils sont issus d’une famille sourde ou entendante, que est leur niveau d’études. Cette liste n’est pas exhaustive, mais cela donne une idée de la variété des éléments qui peuvent façonner un sourd adulte et avoir un impact sur l’acquisition de ses compétences professionnelles et sur sa capacité à intégrer un environnement entendant (parfois perçu comme hostile).

Les sourds signants (utilisant la langue des signes) ont une forte identité sourde et culturelle (dont ils sont fiers), dont les entendants non initiés ne sont absolument pas au courant. L’étiquette d’handicapé est donc réducteur car cela ne met pas en valeur la richesse de la diversité culturelle, notamment l’utilisation d’une autre langue pour communiquer.

Le premier conseil, que je pourrais donner à un organisme de formation qui intègre une personne sourde, est tout d’abord de comprendre qui est cette personne et de valider avec elle ses besoins de communication.
Deuxièmement, il est important de garder en tête que la barrière de la communication est à la charge des deux parties : si les deux interlocuteurs se mettent en position de faire un pas l’un vers l’autre et de partager l’effort, cette barrière sautera beaucoup plus facilement.
La perception de la volonté du monde entendant d’accueillir la personne sourde et de s’adapter à son canal de communication, permettra à la personne sourde de se sentir bien accueillie, prise en compte et valorisée dans sa diversité.
En outre, il est essentiel d’avoir le bon vocabulaire : par exemple on dit SOURD, tout simplement. Il vaut mieux éviter de « tourner autour du pot », en utilisant par exemple des synonymes comme déficient auditif, qui peuvent avoir une connotation négative.
Autre exemple : parlez de Langue des Signes et pas de « langage des signes ».
Rien que l’emploi de ces deux termes permettra à la personne sourde de se sentir plus à l’aise et « vue » dans son intégralité et non pas seulement avec l’étiquette du handicap.

Un autre point important à retenir est que la langue française n’est pas la langue primaire d’un sourd, mais sa langue secondaire. Pour un sourd signant, la langue des signes est sa langue naturelle, celle qui lui permet de comprendre le monde et de s’exprimer aisément. Le français écrit peut être difficile à utiliser, aussi bien au niveau de la compréhension que de l’expression puisque la langue des signes suit une logique (notamment, visuelle) qui est différente de celle des langues orales. De la même manière, un entendant aura des difficultés à s’exprimer de manière parfaitement correcte en LSF, qui est une langue à part entière, dotée de sa syntaxe, de règles grammaticales et d’un lexique d’expressions.

Ainsi lorsqu’on va donc se poser la question de l’apprentissage, il ne faut donc pas partir du principe que la présence d’un texte écrit ou du sous-titrage est suffisant à garantir la compréhension. Bien sûr, les sourds savent lire, mais parfois la structure de la phrase ou le vocabulaire peuvent être complexes à décortiquer, tout comme pour une langue étrangère.
Il peut être opportun de faire le point avec la personne sourde :

  • est-elle à l’aise avec le document écrit qui lui a été proposé ?
  • Y-a-t-il des points flous qu’elle a besoin de clarifier ?

Peut-être certaines phrases peuvent être reformulées pour les simplifier. En cas de difficulté majeure, l’aide d’un interprète en LSF qui va clarifier le contenu permettra à la personne sourde de s’approprier le contenu du document et d’être en mesure, par la suite, de mieux se replonger dans la version en français écrit.

Si l’apprentissage se fait en présentiel via une présentation orale, la présence d’un interprète en LSF est la meilleure solution pour donner à la personne sourde les mêmes outils que les entendants participant à la formation.
L’Agefiph met à disposition un budget pour cela et il ne faut pas hésiter à en faire la demande. Bien évidemment, l’anticipation est primordiale pour garantir une participation aisée de qualité pour la personne sourde.
Mettre le stagiaire face à l’impréparation de l’organisation peut avoir un impact sur sa perception du manque d’inclusion : essayez donc d’anticiper la prise en charge de l’accessibilité, de réserver la disponibilité des interprètes, de prévoir des documents de support bien adaptés.
Faire ressentir à la personne sourde que son confort est aussi important pour l’entreprise que celui de ses collègues entendants, lui permettra de participer sereinement et de manière efficace aux actions de formation ou d’intégration.

Enfin, Il existe des guides pour mieux comprendre la surdité, je vous propose celui de l’INJS (Institut National des Jeunes Sourds) de Paris, qui est riche en explications et en exemples concrets.

Lien vers le guide : guide-injs accueil sourds entreprise

Sources:
https://fr.signandconnect.net
sarapanichi@signandconnect.net

Fermer le menu