L’intelligence artificielle transforme le secteur de la formation en optimisant de nombreuses activités. Mais elle ne peut pas remplacer l’esprit critique humain pour analyser, questionner et intégrer des dimensions subjectives dans le processus d’apprentissage. À mesure que l’IA prend une place croissante, le développement de la pensée critique s’impose comme une priorité. Il est important pour les formateurs de renforcer cette compétence en proposant des activités pédagogiques adaptées.
L’esprit critique, une compétence essentielle
L’esprit critique est et devient encore plus une compétence essentiellle. Les sources d’information utilisées par l’IA ne sont pas toujours fiables. Même si elles savent traiter un grand volume de données et produire des contenus variés, elles reposent uniquement sur des algorithmes et des données existantes. Ces outils ne possèdent pas de capacité à juger avec discernement. Il est donc important de maintenir une vigilance humaine pour analyser et contextualiser ces productions.
Mais qu’est-ce que l’esprit critique ? Il s’agit de la capacité à analyser, évaluer et questionner les informations en intégrant des dimensions telles que l’éthique, l’empathie et l’intuition. Cette réflexion n’implique pas seulement la validation des faits, il s’agit également d’une prise de recul sur ses propres biais et une évaluation consciente de ses propres processus de pensée. Comprendre comment et pourquoi on arrive à certaines conclusions est une étape clé pour affiner son jugement. Cependant, développer l’esprit critique nécessite un accompagnement structuré.
La place du formateur est ainsi prépondérante pour travailler l’esprit critique auprès de ses apprenants. Il doit non seulement maîtriser les outils IA, mais aussi guider les apprenants dans leur utilisation. Pour cela, il peut notamment mettre en place des espaces de discussion et d’analyse.
Des outils et des activités pour développer l’esprit critique
Certaines activités peuvent être mises en place pour cultiver l’esprit critique des apprenants :
- La méthode QQOCQP peut encourager les apprenants à poser des questions sur le Qui, Quoi, Où, Quand, Comment et Pourquoi dans des situations d’incertitude,
- Faire analyser des ressources multimédia comme des vidéos, des publicités, des caricatures, des œuvres… En effet, les IA sont plutôt limitées pour saisir les subtilités, les métaphores ou l’humour. En revanche, l’humain peut apporter une analyse plus approfondie et saisir les messages cachés de l’auteur,
- Instaurer des temps de discussion : Une méthode peut par exemple permettre d’organiser des débats de manière originale. Il s’agit du débat 4 coins qui consiste à répartir les apprenants en 4 groupes sur une question controversée : Tout à fait d’accord, Plutôt d’accord, Plutôt en désaccord, Tout à fait en désaccord. Chaque groupe doit construire un argumentaire pour défendre sa position. Un représentant le présente ensuite aux autres, cela suscite échanges et discussions. L’activité se termine par une synthèse des arguments par le formateur.
Les formateurs peuvent également utiliser l’IA comme un levier pour stimuler l’esprit critique, en concevant des activités qui encouragent les apprenants à questionner, analyser et interpréter les informations générées par ces outils :
- Analyser et critiquer des textes générés avec ChatGPT : En utilisant ChatGPT, les formateurs peuvent demander aux apprenants de générer des textes sur des sujets spécifiques. Par exemple, demander à l’IA de rédiger un argumentaire sur un thème controversé. Les apprenants doivent ensuite analyser ce texte pour identifier les arguments fallacieux, les biais ou les informations erronées. Cette activité permet aux apprenants de développer leur capacité à évaluer de manière critique les informations, tout en prenant conscience des limites et des biais potentiels de l’IA.
- Simuler des débats avec CharacterAI : CharacterAI permet de créer des personnages virtuels qui peuvent tenir un discours cohérent et incarner différents rôles, opinions ou expertises. Les apprenants interagissent avec ces « personnages IA » pour débattre d’un sujet donné. Ils doivent alors formuler des positions, anticiper des contre-arguments et réagir avec pertinence. Cette interaction oblige les apprenants à structurer leurs pensées, à anticiper les contre-arguments et à affiner leurs compétences en argumentation. En confrontant leurs idées à celles de l’IA, ils renforcent leur esprit critique et leur capacité à penser de manière indépendante.
- Animer une activité ThinkPairShare assistée par l’IA : ThinkPairShare est une stratégie pédagogique en trois étapes : réfléchir individuellement (Think), échanger en binôme (Pair), puis partager collectivement les conclusions (Share). L’intégration de l’IA dans chacune de ces phases permet d’enrichir et de structurer le processus, tout en stimulant l’esprit critique des apprenants.
Dans la phase «Think», l’apprenant peut interroger un outil comme ChatGPT pour enrichir sa réflexion individuelle, puis confronter les informations obtenues à sa propre analyse. Dans la phase «Pair», il peut travailler en binôme tout en sollicitant un outil IA comme CharacterAI pour questionner, challenger et préciser ses arguments. Enfin, pour la phase «Share», l’ensemble du groupe mutualise ses idées sur une plateforme visuelle éventuellement dotée d’une fonction IA de regroupement et de synthèse des apports (comme Gamma par exemple), afin de permettre au formateur de recentrer la discussion, d’examiner la pertinence des arguments et d’aiguiser chez chacun l’esprit critique.
- Identifier les biais de l’IA : Une activité consiste à exposer les apprenants aux biais potentiels de l’IA en leur faisant analyser des cas concrets où l’IA a produit des résultats biaisés. Par exemple, examiner comment certains outils peuvent renforcer des stéréotypes ou des préjugés. Les apprenants doivent identifier les biais, comprendre leur origine et proposer des solutions pour les atténuer. Cette activité sensibilise aux enjeux éthiques de l’IA et renforce la vigilance critique des apprenants.
Sources :
https://enseigner.u-bordeaux.fr/application/files/8117/3167/9154/CahierLLL_IAG_OKOER.pdf